CONNEXIONS, DÉCONNEXIONS ET RECONNEXIONS DANS LES SOCIO-HYDROSYSTÈMES : ÉVALUER L'INTERFACE VISIBLE/INVISIBLE DANS L'INTERACTION ENTRE LES DIMENSIONS SOCIALES ET ENVIRONNEMENTALES DES SOCIO-HYDROSYSTÈMES.
François-Michel Le Tourneau, Directeur de Recherche au CNRS, Directeur de l'OHMI Pima County
David Blanchon, Professeur, Université de Paris Nanterre, Département de géographie
Le projet de recherche HYDECO, financé par le CNRS et l'INEE à travers le Labex DRIIHM, est un projet interdisciplinaire et multi-sites. Le projet de recherche s'appuie sur le réseau des Observatoires Hommes-Milieux (OHM), en place depuis 2007.
La relation entre les sociétés et leurs hydrosystèmes peut être comprise comme une série de connexions et de déconnexions qui se produisent dans tous les domaines (hydrologique, géomorphologique, écologique, etc.) et dimensions (longitudinale, verticale, latérale). L'utilisation des cours d'eau et des ressources en eau crée des connexions matérielles et symboliques qui amènent les acteurs de l'eau à considérer également les dimensions sociologiques et politiques, esthétiques et spirituelles du socio-hydrosystème. Cependant, le développement de déconnexions physiques (infrastructures lourdes, comme les barrages) ou sociales (les plans d'eau sont tellement artificialisés que les résidents locaux oublient leur existence) génèrent d'importantes déconnexions. Par conséquent, les récentes politiques de l'eau et de l'environnement soulignent l'importance de la connectivité entre les différents éléments et compartiments des socio-hydrosystèmes et se concentrent particulièrement sur la mise en œuvre de processus de reconnexion à tous les niveaux. Dans ce contexte, l'objectif du projet HYDECO est de tester l'efficacité de la grille de lecture connexion/déconnexion/reconnexion appliquée aux socio-hydro-systèmes et de ré-explorer la notion de connectivité de manière critique et exemplifiée.
Ainsi, le projet propose de créer un terrain fertile pour ré-explorer le concept de socio-hydrosystème et ses implications socio-écologiques, en mettant l'accent à la fois sur les évolutions socioculturelles et les interactions fonctionnelles entre toutes ses composantes. Pour ce faire, le projet articule les cadres théoriques suivants : l'opposition visible/invisible telle que développée dans la théorie du paysage, et le concept de point de bascule (tipping point) issu des domaines de la climatologie, des sciences de l'environnement et de l'écologie. Le point de bascule correspond à un niveau critique à partir duquel un système bascule vers un état alternatif, qui peut être interprété dans certains cas comme une bifurcation catastrophique.
La contribution innovante de ce projet est d'utiliser le concept de tipping point pour comprendre comment et où les connexions et les déconnexions ont lieu dans les systèmes socio-hydriques. Existe-t-il des seuils au-delà desquels le fonctionnement des socio-hydrosystèmes est irréversiblement altéré ? Est-il possible de les prévoir ? Inversement, les connexions/déconnexions peuvent-elles conduire à une évolution des socio-hydrosystèmes vers des modes de fonctionnement radicalement différents ?
Pour répondre à ces questions, le projet mobilise une équipe de 40 chercheurs, répartis sur 7 sites d'étude différents pendant 3 ans : le comté de Pima (OHMI Pima County à l'IRL iGlobes - CNRS Université d'Arizona) ; la vallée du Rhône (OHM Vallée du Rhône, Université de Lyon) ; les lagunes méditerranéennes de l'étang de l'Or et de Biguglia (OHM Littoral méditerranéen à l'Université de Montpellier et à l'Université de Corse) ; la vallée du Rhin (OHM Fessenheim à l'Université de Strasbourg) ; la lagune atlantique d'Estarreja (OHM Estarreja à l'Université d'Aveiro, Portugal) ; le bassin versant d'Umiujaq (OHM Nunavik, Université de Laval, Québec) ; la tourbière de Bernadouze et les lacs de haute montagne des Pyrénées françaises (OHM Pyrénées-Haut Vicdessos à l'Université de Toulouse).
L'objectif est de collecter les données et d'articuler les analyses produites pour l'ensemble des socio-hydrosystèmes afin de les examiner dans une perspective comparative et interdisciplinaire. Cette comparaison et ce dialogue entre les différentes situations observées seront rendus possibles par le développement d'un lexique commun basé sur le vocabulaire largement accepté par la communauté scientifique pour les socio-hydrosystèmes. L'objectif est de savoir s'il existe des déterminants communs des connexions/reconnexions, mais aussi si l'on peut identifier des effets récurrents permettant d'anticiper les évolutions futures au sein des territoires observés ou, plus largement, dans l'ensemble des socio-hydrosystèmes mondiaux soumis aux mêmes conditions.
1. OHM Pima County : Tucson Active Management Area et la rivière Santa Cruz
Axes de recherche :
2. OHM Vallée du Rhône : Le corridor fluvial du lac Léman au delta
3. OHM Littoral méditerranéen : Les lagunes de l'Etang de l'Or (Montpellier) et de Biguglia (Bastia, Corse)
4. OHM Fessenheim : Les îles rhénanes entre le Grand canal d'Alsace et le Rhin
5. OHM Estarreja : La lagune atlantique d'Estarreja (Portugal)
6. OHM Nunavik : Le bassin versant d'Umiujaq (Québec, Canada)
7. OHM Pyrénées-Haut Vicdessos : La tourbière de Bernadouze et les lacs de tête de bassin